Une épine dans le pied de la métropole Nice – Côte d’Azur
Toute une agitation émerge sur la métropole Nice – Côte d’Azur où il apparaît que l’on puisse « récupérer son argent » :Dans la foulée un candidat à la mairie de Nice est monté dans le train en marche pour suggérer aux Niçois de se faire rembourser par le fisc le trop versé sur la Taxe d’Enlèvement des Ordures Ménagères (TEOM). C’était trop beau pour être vrai. Très vite les services fiscaux ont réagi pour annoncer par l’intermédiaire du directeur général des finances publiques (DGFIP) qu’il n’y aurait plus de remboursements et que les prochaines demandes seront rejetées. Ce qui signifie que
il y a bien eu des remboursements
mais que la fête était finie.
Nous avons voulu en savoir plus et avons commencé notre enquête par Marc Moschetti. Celui-ci nous explique que la métropole Nice – Côte d’Azur coûte bien plus cher aux Laurentins qu’elle ne leur apporte. Le tracé de ce mastodonte administratif est totalement aberrant et fut dessiné sur mesure pour mutualiser les dettes de Nice :
Historiquement, géographiquement, culturellement Nice a toujours été délimitée par le Var. Le Comté de Nice ne fut rattaché à la France qu’en 1860. Sur la rive droite du Var, Saint-Laurent-du-Var est provençale et pas niçoise. Du reste on n’y parle pas nissart.
Dès 2018 Marc Moschetti, élu d’opposition à Saint-Laurent-du-Var, soulève le problème du trop perçu sur la Taxe d’Enlèvement des Ordures Ménagères et incrimine la métropole. Il reprend l’argument soulevé en conseil municipal à Nice, également par un élu d’opposition, Guillaume Aral :
Marc Moschetti revendique son action mais précise que ce n’est pas lui, ni Guaillaume Aral, qui a levé le lièvre, c’est… Laurent Guibert que nous avons rencontré. Celui-ci nous explique donc l’histoire du trop perçu sur la Taxe d’Enlèvement des Ordures Ménagères de la métropole. Pour bien comprendre cette histoire complexe, il faut bien entrer dans les détails parfois techniques. Mais lisez bien, c’est très intéressant.
En novembre 2017, Laurent Guibert est informé de ce que l’on appelle le « décret Auchan » [source] qui date toutefois de 2014 et touche la métropole lilloise.
Détail technique important : il s’agit ici d’une taxe et non d’un impôt. Une taxe — contrairement à l’impôt — repose sur un objet qui doit être défini et dont le montant ne peut excéder son coût de plus de 2,5 %.
Par suite la Taxe d’Enlèvement des Ordures Ménagères ne peut excéder de 2,5 % le coût de l’enlèvement des ordures ménagères.
Ce que ne respectait pas la métropole lilloise qui fut retoquée par le Conseil d’État (la plus haute juridiction de l’administration publique).
Ayant longtemps exercé dans une banque d’affaires, puis en tant que conseil auprès d’entreprises, Laurent Guibert se penche sur ce jugement, et sa curiosité alliée à ses compétences comptables et fiscales le conduisent à se poser la question : quid de notre métropole ?
Il se penche sur les comptes administratifs de la métropole Nice – Côte d’Azur pour les années 2014, 2015, 2015 et 2017. Ces documents sont ceux fournis par la métropole elle-même et sont disponibles en ligne. Et là…
il découvre le pot aux roses :
TEOM COLLECTEE |
COÛT D’ENLEVEMENT |
TROP-PERCU |
DOCUMENTS ANALYSÉS |
||
€uros |
% |
||||
2014 |
96 780 682 € |
36 018 565 € |
60 762 117 € |
63 % |
Compte administratif et Rapport de présentation 2015, pages 9 & 26 |
2015 |
97 270 700 € |
30 150 831 € |
67 119 869 € |
69 % |
Compte administratif et Rapport de présentation 2015, pages 9 & 26 Compte administratif et Rapport de présentation 2016, page 11 |
2016 |
98 961 085 € |
29 320 000 € |
69 641 085 € |
70 % |
Compte administratif et Rapport de présentation 2016, page 11 Budget primitif 2017, pages 19 et 32 |
2017 |
101 052 445 € |
33 586 111 € |
67 466 334 € |
67 % |
Budget primitif 2017, pages 19 et 32 Compte administratif et Rapport de présentation 2017, pages 14 et 27 |
TOTAL |
264 989 405 € |
|
Comme à Lille, la métropole Nice – Côte d’Azur perçoit également des dizaines de millions de Taxe d’Enlèvement des Ordures Ménagères en trop !
Et puis pas qu’un peu : 265 millions de trop perçu sur seulement 4 ans !
En novembre 2019 Laurent Guibert souhaite alerter les élus d’opposition de la métropole et ne reçoit aucun écho sauf… de Guillaume Aral, élu d’opposition Divers Droite. Celui-ci évoque le sujet avec l’un de ses amis avocat fiscaliste au barreau de Nice, maître Christophe Pelloux. Avant d’être avocat fiscaliste, Christophe Pelloux fut pendant 10 ans inspecteur des impôts au sein de la Direction Générale des Finances Publiques. Aral, Pelloux et quelques amis décident de créer une association pour faire valoir les droits des citoyens : l’ASCOME.
Sur sa page facebook, l’ASCOME déclare que l’association a été créée suite à une volonté de faire en sorte que les impôts locaux soient maîtrisés par les acteurs politiques, quels qu’ils soient. Cela ne semble pas être le cas en effet. Un exemple caractéristique est le taux prohibitif de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères sur le territoire de la Métropole de Nice Côte d’Azur.
En novembre 2019 une trentaine de personnes ont demandé le remboursement et l’ont obtenu. La métropole tente alors de se prémunir d’un raz-de-marée de contribuables mécontents et crée une régie chargée de l’enlèvement des ordures. Un artifice comptable est mis en place dans un budget annexe avec le seul but d’ajuster les coûts — qui augmentent brutalement de 30 % — avec la taxe correspondante. La ficelle est très grosse et ne dupe personne.
Autre problème : la personne en charge d’auditer les comptes de la métropole n’est autre que le directeur départemental des finances publiques (DGFIP). Étant juge et partie, il exerce ses fonctions avec un évident conflit d’intérêt, en contradiction avec le Guide de déontologie des agents de la direction générale des finances publiques (pages 10 et 17 notamment).
Laurent Guibert rejette toute arrière-pensée politique
La preuve ? Alors que ce dossier est plutôt repris par des opposants « Divers droite », il interviendra prochainement sur une vidéo réalisée par Europe Écologie Les Verts. Il est en effet très tentant pour un candidat aux prochaines élections municipales de récupérer ce dossier. Ce qui est le cas de Benoît Kandel qui dénonce maintenant cette taxe alors qu’il fut le premier adjoint de Christian Estrosi pendant cinq ans, de 2008 à 2013, à l’époque où il votait le budget de la métropole. Ce que dénonce bien entendu notre lanceur d’alertes.
Avec cette affaire de trop perçu sur la taxe d’enlèvement des ordures ménagères, Laurent Guibert a déclenché la grosse sirène car les enjeux portent sur des millions d’euros.
L’affaire s’emballe sur la Côte et tout le monde veut se faire rembourser sa TEOM !
Ce qui était acceptable pour une trentaine de contribuables ne l’est plus dès lors qu’ils sont des centaines. Bientôt des milliers ? Peut-être des centaines de milliers ?
Le directeur général des finances publiques — juge et partie — annonce que les demandes de remboursement sont dorénavant toutes rejetées. Pourquoi donc ? Parce-qu’il y en a trop ? Le Droit ne serait donc applicable que pour une minorité d’initiés ? et donc pas pour le Peuple ?
Maître Pelloux rétorque alors : « S’il y a rejet, l’ASCOME continuera son action au niveau du tribunal administratif pour faire constater que la création du budget annexe n’a rien changé au niveau d’imposition subi par les contribuables. »
L’affaire pourrait aussi être beaucoup plus grave et être du ressort de la juridiction pénale (dans ce cas-là il n’y a plus de prescription) si l’on parvient à démontrer que la publication d’un budget annexe n’avait pour but que de masquer la concussion de la métropole au travers d’une manipulation comptable.
Massimo Luce
ENCORE DE L ARGENT DETOURNE POUR LEURS ELUCUBRATIONS ET COMME TOUJOURS PAS DE CONTROLE