Macron : une allocution qui nous embrouille encore plus
Rouvrir les crèches, les écoles, les collèges et les lycées dès le 11 mai. Voilà donc la dernière idée-force de notre Président.
Cette réouverture doit être la décision la plus visible et la plus symbolique de ce grand déconfinement que des millions de Français au bord de la crise de nerfs semblent attendre avec plus ou moins de patience.
Il a fallu à Macron, de son propre aveu plusieurs jours (semaines ?) de consultations tous azimuts pour arriver à cette décision finale. Si l’on écoute aujourd’hui les réactions presqu’à chaud de nos compatriotes parents, enseignants, ou soignants, on se demande bien s’il ne devrait pas aller consulter ailleurs… Je n’ai pas entendu un seul avis approbateur de cette nouvelle initiative présidentielle. Tout le monde émet des réserves, pour diverses raisons, à cette reprise annoncée un mois à l’avance comme si la certitude de sa faisabilité était d’ores et déjà établie.
Mais les parents sont inquiets
On leur a dit au mois de mars que les enfants étaient les principaux vecteurs de la propagation, même s’ils n’en avaient pas les symptômes, et ceci avant la décision du confinement. En effet les enfants, d’après les spécialistes qui se succédaient en mars sur les écrans, seraient asymptomatiques, c’est-à-dire qu’ils pourraient très bien être contaminés mais sans être malades. On dit en général des maladies asymptomatiques qu’elles sont les plus dangereuses parce que justement non diagnostiquées. Même si peu d’enfants ont développé la maladie, on comprend l’inquiétude des parents à remettre leur progéniture dans des lieux potentiellement contagieurx ce qui risque en retour de contaminer papa, maman, papy et mamie.
Les enseignants aussi sont inquiets
Outre la peur de la contamination, semblable à celle des parents, les enseignants appréhendent les conditions matérielles de cette rentrée. Comment va t‑on fonctionner ? Jean-Michel Blanquer a tout de suite annoncé qu’il ne serait pas question pour les enseignants de travailler avec des grands groupes « comme avant ». Oui, mais… si on a une classe de 25–30 élèves, on évite comment le grand groupe ? Une moitié le matin, l’autre l’après-midi ? On fait comment pour respecter la « distanciation sociale » ? Un seul élève par bureau ? Où prend-on du gel pour se laver les mains ? Combien de litres en faudra t‑il ? Et les masques ? Y en aura t‑il pour les élèves ? Prend-on le risque que, comme Sybeth Ndiaye, ils ne sachent pas bien les utiliser ? Quid du matériel collectif ? Quid de la cantine ? Saura-t-on bien expliquer à des petits de deux ans les consignes de sécurité ? Et pourra-t-on leur laisser ainsi une toute petite autonomie sans être en permanence sur leur dos ?
Le Président a dit que la non reprise de l’école pourrait favoriser une discrimination entre les élèves qui sont suivis par les parents, et ceux qui ne le sont pas. Entre ceux qui possèdent une connexion internet et ceux qui n’en possèdent pas. Entre ceux qui suivent les cours et ceux qui ne les suivent pas (environ 10% d’élèves « perdus » d’après les chiffres donnés). Ce n’est certainement pas le manque d’un ou deux mois de classe qui va nuire à la scolarité future des élèves, en tous cas jusqu’au lycée !
La réalité est tout autre. La volonté du Président est de remettre au plus vite le plus de Français possible au travail. L’économie, la sacro-sainte économie ne peut plus attendre. C’est que le gouvernement prévoit un recul du PIB de 8% et un déficit public de 9% en 2020. Toujours cette dette.…
Question : il n’y a personne pour effacer ou réduire la dette de la France alors que la France annule la dette de l’Afrique. Qui a une réponse ?
Écoutons à présent les consignes du Medef. Geoffroy Roux de Bézieux prévient déjà, il faudra bosser bien plus. Adieu les 35h, adieu les semaines de vacances payées, du moins pour un certain temps… Et « en même temps » selon l’expression bien connue, la vice-présidente du Medef Dominique Carlac’h n’écarte pas la possibilité de « mettre un coup de collier » pour la reprise du travail.
Voilà de bonnes raisons de faire reprendre l’école aux chères têtes (de moins en moins) blondes.
Il est encore trop tôt à l’heure où j’écris, pour connaître la décision des municipalités, qui ont largement leur mot à dire. Mais d’ores et déjà des voix se lèvent, comme ici, dans notre département, le maire de Villeneuve Loubet, Lionel Luca qui s’exprimant sur les réseaux sociaux, rejette catégoriquement l’idée d’une réouverture des écoles de sa commune dans un délai aussi court.
Les declarations du président ce soir me paraissent très hasardeuses:d’abord parce que nul ne peut dire ce qu’il en sera…
Publiée par Lionnel Luca sur Lundi 13 avril 2020
Le maire de Cannes, Davis Lisnard, exprime son désarroi face à une « décision surprenante » et en appelle à tous les maires des Alpes Maritimes pour « interpeller ensemble le Gouvernement » :
Mais tout le monde le sait, d’ici au 11 mai, il peut s’en passer des revirements et des contrordres…
Patrice LEMAÎTRE