Voilà une information qu’elle est intéressante !
Ce confinement suscite tellement la morosité qu’il faut bien trouver le moyen d’amuser le bon peuple et, peut-être aussi, le détourner des cafouillages du gouvernement dans la gestion de la crise sanitaire et, depuis l’annonce du Président, dans la façon d’en sortir. Le gouvernement nous envoie régulièrement le clown Sibeth. Mais celui-ci fait de moins en moins rire. Alors, les médias ont trouvé autre chose : balancer des sondages. C’est sympa, les sondages ! Ça fait couler beaucoup de salive et beaucoup d’encre.
L’incontournable Ifop a donc été mandaté par le site d’information 24Matins.fr – édité par l’entreprise ADN Contents (portail internet) – pour mener une enquête d’une importance capitale : l’impact du confinement sur l’hygiène corporelle et vestimentaire des Français. « Voilà une préoccupation qu’elle est intéressante ! », aurait dit Coluche. Tellement importante qu’elle a été reprise par la totalité des médias, quelle que soit leur interface : écrite, audiovisuelle ou en ligne. Bonne pioche pour l’Ifop qui a, sur ce coup, bien rempli ses caisses.
Ce sondage a été réalisée auprès d’un échantillon de 1016 personnes « représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus » (soit 0,0015 % de la population !). Il comprend donc un certain nombre d’ados à peine majeurs lesquels, comme chacun sait, ne brillent pas par leur amour de la salle de bain, confinement ou pas. Il doit comprendre aussi des personnes âgées qui ne disposent pas de l’autonomie nécessaire à une hygiène régulière. Mais bon, ne cherchons pas des poux dans les têtes et examinons les résultats de ce sondage de plus près. Qu’apprend-on ?
Les Français ne se lavent pas tous quotidiennement. Seulement 67% le font : 74% de femmes et 61% des hommes. Mais les femmes n’étaient propres – si tant est que la « propreté » se définisse par une toilette complète par jour – qu’à 81% avant confinement et les hommes à 71%. Ceci tend donc à montrer, avant tout, que les Français peu accros à l’hygiène étaient déjà nombreux avant le confinement, à raison de 2 femmes sur 10 et 3 hommes sur 10. En fait, on découvre qu’il y a seulement 16% des femmes et 20% des hommes qui se sont laissé aller en raison du confinement. Pas de quoi dramatiser ! On apprend aussi que les confinés esseulés font plus facilement l’impasse sur leur toilette. Somme toute assez logique : on ne risque d’incommoder que soi-même.
Concernant ce que le sondage appelle « l’hygiène vestimentaire », pas de grandes révélations là encore, sinon que les hommes changent moins souvent de caleçon (ou slip). Si les femmes sont plus rigoureuses sur ce point, c’est dans doute parce que ce « vêtement » étant de nos jours réduit à une simple ficelle confinée, elle aussi, dans un espace très fermé, elles ont tout intérêt à ne pas laisser trop infuser l’accessoire, si vous voyez ce que je veux dire. On apprend enfin qu’elles portent moins le soutien-gorge, ce qu’on n’aura pas trop de mal à comprendre. Enfin, ces négligences vestimentaires s’observent surtout chez les jeunes de moins de 25 ans. Ce qui renvoie à l’observation sur l’hygiène des ados faite plus haut.
En conclusion, cette enquête n’est pas la bombe que les médias ont bien voulu en faire
Gageons que leur but était ailleurs dans les circonstances que l’on sait. Si on veut lui trouver un quelconque intérêt ce sera celui de montrer l’impact que peut avoir l’environnement social sur l’hygiène individuelle et l’appréciation de soi. Pour autant, est-ce que cela nécessitait un sondage ? À mon avis, l’Ifop vient de redécouvrir l’eau tiède. Peu importe, l’attention du petit peuple a été détournée pendant 48 heures, c’est ça qui compte.
Charles ANDRÉ