À Cannes, le béton enfoui dans la mer devient « éco-musée »
Nous avions alerté nos lecteurs sur la manière dont se prenait la mairie de Cannes pour jeter 300 000 euros à la baille : en immergeant des blocs de béton au large de l’île Sainte Marguerite.
Lire notre article Cannes : 300 000 euros jetés à l’eau du 22 novembre 2019 :
Et bien nous y voilà : les blocs de béton ont été enfouis ce 28 janvier 2021 à l’issue d’une manutention très lourde et très coûteuse. Mais ces blocs de béton sont devenus — par le miracle de l’embrouille sémantique dont nos politiciens sont les experts — devinez quoi ? : un éco-musée.
Moment fort avec l’immersion des 6 statues de l’artiste Jason deCaires Taylor, ancrant aux abords de l’île #SainteMarguerite #Cannes le 1er écomusée de France et de Méditerranée d’un maestro mondialement reconnu en la matière.
— David Lisnard (@davidlisnard) January 28, 2021
Pour l’art et l’environnement. pic.twitter.com/ZY5HQ6VyeA
Nous sommes sensibles à la louable intention du maire de Cannes d’étendre la zone d’interdiction de mouillage entre les îles de Lérins qui est devenue une véritable catastrophe non seulement écologique mais socio-culturelle. C’est une honte à l’image de notre société hédoniste et peu scrupuleuse de l’environnement :
L’installation de cet écomusée, qui figurait dans mon projet de mandat, a permis d’étendre la zone d’interdiction de mouillage entre les îles de Lérins. Favorisant la biodiversité, il sera à la fois un objet d’art et de sensibilisation à la protection de la Méditerranée.#Cannes pic.twitter.com/8jVdAkGo8K
— David Lisnard (@davidlisnard) January 28, 2021
Mais « musée » et « éco », là, le maire de Cannes se paie des mots et de la figure de ses électeurs contribuables qui savent encore le sens des mots :
Musée ? En quoi ces moulages massifs en béton sans aucune créativité artistique constituent-ils un musée ? Rappelons qu’un musée est un « établissement ouvert au public où sont conservés, répertoriés, classés des objets, des documents, des collections d’intérêt artistique, scientifique ou technique, dans un but socioculturel, scientifique et pédagogique ». Qu’est-ce qui est répertorié, classé, archivé ici ? Où est l’intérêt artistique, scientifique ou technique ? Si ce n’est dans la tête du maire qui veut y voir « une œuvre onirique ».
Écologique ? Ah bon ? Le béton à la mer devient écologique lorsqu’il est jeté au large des îles de Lérins ? S’il voulait prendre une mesure écologique, le maire n’avait qu’à interdire le mouillage prolongé entre les îles Sainte Marguerite et Saint Honorat. Mais ça, c’est une autre histoire autrement plus difficile qui requiert du courage politique et non plus du blabla.
Cette opération pose également une autre question : de quel droit le maire de Cannes dispose-t-il de ces fonds marins ? Qui l’a autorisé à s’en accaparer ? Et puis aussi, les citoyens peuvent changer le nom des rues ou déboulonner les statues à l’issue des mandats de certains élus. C’est chose courante. Mais là ? Qui ira repêcher ces déchets ?
Nos maires disposent de manière discrétionnaire et souvent très opaque du « 1% artistique »(1). Ces budgets sont utilisés pour complaire à leur égo et à certains amis. Nous l’avons vu tout récemment à Nice également où le maire a rasé sans la moindre concertation la fontaine de la place du Palais (lire Fontaine du Palais de Nice : le mécontentement déborde du 23 janvier 2021).
Décidément il reste encore des progrès à faire pour que nos politiciens mettent fin au mépris de leurs « administrés ».
Massimo Luce
(1) Lire également dans nos colonnes Lou Che à Nice défraie la chronique… et défraie son créateur du 12 décembre 2019
[NDLR] Illustration à la une : tétrapode enfoui (source Concrete Layer Innovations)
Bonjour Monsieur BURLOT
J’ai lu avec attention votre article en fin du quotidien Nice Matin 29 janvier 2021 sur l’écomusée sous marin à Sainte Marguerite.
L’idée est sympathique de mettre des statues style Ile de Pâques entre 3 et 5 m pour distraire les vacanciers l’été.
Mais par contre je trouve que c’est un abus de langage de parler d’écomusée. Si tout objet posé au fond de l’eau comme des carcasses de navires ou des avions, développe la vie marine car elle offre de multiples cachettes aux différentes espèces animales et végétales marine, un monolithe tout d’un bloc sans aucun trou ne participe que très peu à une augmentation de la vie marine et donc à l’écologie.
Je vous suggère donc de rédiger un nouvel article sur les idées les plus opportunes pour la création d’un véritable écomusée sous marin.
Je vous envoie à cet effet quelques propositions de sculptures naturelles de pierres qui seraient tout à fait adaptées pour un écomusée sous marin.
Bernard HENOU
Docteur en géologie
40 avenue Sainte Marguerite 06200 NICE
Tél : 06 12 23 12 51
Mail : b.henou@orange.fr