Des décou­vertes dou­ble­ment lumi­neuses car l’éminente archéo­logue-épi­gra­phiste et spé­cia­liste des reli­gions anciennes a su d’une part décryp­ter les signi­fi­ca­tions des gra­vures et d’autre part pro­po­ser une inter­pré­ta­tion glo­bale du site : il appa­raît que celui-ci est conçu comme un reflet de l’Univers dans son ensemble réper­cu­tant notre monde (val­lée de Fontanalba) et l’Au-delà (val­lée des Merveilles) où l’on observe l’é­mer­gence du culte solaire.

Vallee_des_Merveilles_Nouveau_regard_Emilia_MassonNul hasard dans la posi­tion ou l’orientation des prin­ci­pales gra­vures et des méga­lithes (qui sou­vent se font face ou sont pla­cés dans des ali­gne­ments signi­fi­ca­tifs) ou des objets lithiques (des outils sou­vent en forme d’animaux). Ces der­niers décou­verts par Emilia Masson montrent, fait nou­veau, que les gra­vures ne sont pas les seuls tré­sors légués par les anciens. Guidée par Hésiode et d’autres auteurs anciens ou ins­pi­rée par Jung, elle a su com­prendre le site à l’aune des croyances d’une com­mu­nau­té alors bien vivante. Tous les indices recueillis montrent qu’une longue pro­ces­sion entre­cou­pée de rites avait lieu lors du sol­stice d’été, elle com­men­çait à l’aube à l’est de La Cime des lacs puis se pour­sui­vant par une longue courbe au sud, elle se finis­sait en fin de jour­née à l’ouest (flanc du Bego) sur le replat qui fait face à la Cime des lacs, sui­vant sym­bo­li­que­ment la course du soleil.<http://www.nice-provence.info/var/wp-content/uploads/sites/6/2017/01p>

Si la val­lée ver­doyante de Fontanalba évoque le monde des hommes et du pas­to­ra­lisme, celle rocailleuse, rude, tour­men­tée, miné­rale de la Vallée des Merveilles évoque l’Au-delà et le monde des dieux. Puisant dans Hésiode, Emilia Masson a inter­pré­té les trois stèles majeures comme le récit de la Création. La stèle la plus éle­vée sur le Pic des Merveilles repré­sen­tant le couple pri­mor­dial, celui du Ciel uni à la Terre, en contre­bas à une cin­quan­taine de mètres, la stèle dite du sor­cier évoque Chronos sépa­rant le couple pri­mor­dial et ava­lant ses frères et enfants afin de ne pas être détrô­né à son tour. Enfin la troi­sième stèle, dite du chef de tri­bu, évoque la prise du pou­voir du nou­veau dieu, celui de l’Orage et l’ap­pa­ri­tion des hommes.<http://www.nice-provence.info/var/wp-content/uploads/sites/6/2017/01p>

Attirée dès sa pre­mière visite par un gigan­tesque visage sculp­té par la nature et peut-être par­ache­vé par l’homme, et fai­sant face aux trois stèles (ou plu­tôt le contraire), Emilia Masson fut très vite intri­guée par la Cime des Lacs dont le visage occupe le flanc nord. Un constat révé­la­teur : au sol­stice d’été, le soleil atteint son point zéni­thal au des­sus du mas­sif pyra­midl au visage. Tout un ensemble d’indices condui­sirent Emilia Masson à déduire l’existence d’un centre cultuel secret. Déduction bien­tôt confir­mée en 1994 avec la décou­verte dans les entrailles de la Cime du lac d’une faille-grotte abri­tant en son fond, sur un pan­neau lis­sé par l’homme, un ensemble de gra­vures, cer­taines colo­riées en ocre, notam­ment douze petits anneaux, ayant expli­ci­te­ment une signi­fi­ca­tion solaire. Est décou­verte éga­le­ment une che­mi­née lais­sant pen­ser à un che­min ini­tia­tique de retour vers la lumière. À noter que vue depuis le fond de la grotte, la por­tion ain­si décou­pé « est le point du sol­stice d’hiver dans le ver­seau » selon l’é­minent paléoas­tro­nome Paul Verdier. Emilia Masson venait de trou­ver le véri­table cœur de l’ensemble des Merveilles. Après de nom­breuses autres décou­vertes à l’aube des années 2000, Emilia Masson, gui­dée par ses intui­tions et par la confi­gu­ra­tion du lieu, devait ins­pec­ter les ébou­lis, sur le flanc est de la Cime des Lacs et ensuite sur son flanc nord .

Vallee_des_Merveilles_Cimes_et_abimesAujourd’hui encore en 2014, l’aventure scien­ti­fique d’Emilia Masson se pour­suit tou­jours avec, à la clef, de nou­velles décou­vertes dont nous nous ferons pro­chai­ne­ment l’écho. Aidée par des spé­cia­listes qui font auto­ri­té, tels Paul Verdier en paléo-astro­no­mie ou Bruno Ancel archéo­lo­gie, les décou­vertes d’Emilia Masson touchent au plus pro­fond de notre his­toire et de notre culture. Nous y revien­drons dans nos colonnes. Il s’a­git éga­le­ment d’une véri­table aven­ture humaine qui touche au roman car ces avan­cées ont dû affron­ter l’es­ta­blish­ment des struc­tures scien­ti­fiques en place. L‘incurie, la mau­vaise foi, l’ostracisme de cet esta­blish­ment apportent de sur­croît une dimen­sion « trop humaine » à toutes ces découvertes.

Alain-Christian Drouhin
NB : ces deux ouvrages sont en vente à la librai­rie Libre Diffusion à Nice