Ils préparent « L’APRÈS » en oubliant l’avant

Avec la notion d′« APRÈS », la cri­tique du mon­dia­lisme et les bien­faits d’un cer­tain « sou­ve­rai­nisme » reviennent à la mode. Les mou­ve­ments qui prônent une nou­velle éco­no­mie plus locale sont de plus en plus nom­breux, même si, mal­heu­reu­se­ment leurs voix sont éparses. Il manque à tous ceux-là une tête, un lea­der, un chef, sor­ti des par­tis poli­tiques que les Français hon­nissent de plus en plus. Mais quel­qu’un qui ne sor­ti­rait pas du mari­got, incon­nu pour­quoi pas, mais légi­time et hon­nête, com­ment l’i­den­ti­fier ? Lançons une annonce pour le (la) trouver !

Parmi tous les res­pon­sables de la crise que nous vivons (et ils sont nom­breux à pou­voir se comp­ter depuis l’ère Giscard), j’ai bien dit « res­pon­sables », donc des gens qui, à un moment ou un autre, ont exer­cé le pou­voir, ou l’ont influen­cé d’une manière ou d’une autre, il en est trois, que l’on croyait dis­pa­rus, mais qui reviennent aujourd’­hui se rap­pe­ler à notre bon sou­ve­nir, sachant que, le Français ayant la mémoire très courte, il pensent que leur sera fait un pont d’or pour leur retour au pre­mier plan.

Commençons à gauche avec l’eu­ro­dé­pu­té Raphaël Glucksman, fils de son mao-gau­chiste. Libéral-liber­taire, il se recycle aujourd’­hui dans une sorte de fédé­ra­lisme euro­péen. S’il reste vis­cé­ra­le­ment par­ti­san de l’Union Européenne, le com­pa­gnon de la jour­na­liste Léa Salamé prône main­te­nant (voir inter­view dans l’OBS), une forme de sou­ve­rai­nisme ! Mais comme il ne veut quand même pas tom­ber trop bas, il joue comme le maître de l’Élysée sur le bi-dis­cours : sou­ve­rai­niste, oui, mais Europe fédé­rale « en même temps ». Pour Glucksmann, en fait c’est l’Union Européenne qui doit être sou­ve­raine, pas les États : « L’Europe est au fond le der­nier conti­nent à croire en la fable de la mon­dia­li­sa­tion heu­reuse ». Bref, on rede­vient sou­ve­rain, ou on reste euro-libé­ral ?Raphaël Glucksmann - Léa Salamé 

Ensuite, Môssieur DSK. Le chantre du social-libé­ra­lisme, l’an­cêtre du pro­gramme macro­niste, que l’on voyait déjà Président en 2012, avant ce que vous savez…
Et bien lui aus­si cri­tique, certes bien timi­de­ment, la mon­dia­li­sa­tion qu’il a tant appe­lé à déve­lop­per. Et avec un cynisme inouï, pre­nant vrai­ment les Français pour des cons, il assène cette phrase qu’on croi­rait sor­tie d’un autre monde : « Nous consta­tons, éber­lués, qu’une bonne part de nos appro­vi­sion­ne­ments en médi­ca­ments dépend de la Chine. En lais­sant ce pays deve­nir « l’usine du monde » n’avons-nous pas renon­cé dans des domaines essen­tiels à garan­tir notre sécu­ri­té ? » Sans le coro­na­vi­rus, il ne s’en serait jamais aper­çu le pauvre ! Et, tenez vous bien, une autre phrase vaut encore plus le détour, où il estime que ceux qui dénoncent « l’absurdité éco­lo­gique de faire tran­si­ter vingt fois des mar­chan­dises d’un bout à l’autre de la pla­nète ont par­fai­te­ment rai­son ! » On croit rêver devant tant de… de quoi ? De bêtise ? Certainement pas. De cynisme, c’est le mot que j’employais plus haut. Rien à ajouter.Dominique Strauss-Kahn

Troisième et der­nier lar­ron à sen­tir le vent du bou­let, et cher­chant à se mettre à l’a­bri, Xavier Bertrand, ci-devant pré­sident du conseil régio­nal des Hauts-de-France. Lui qui était un fervent et fana­tique défen­seur de l’Union Européenne dans ce qu’elle a de pire, c’est-à-dire la finance, lui qui défen­dait corps et âme la fameuse « règle d’or » de la rigueur bud­gé­taire, source de l’aus­té­ri­té qui a cau­sé la perte de la Grèce notam­ment, ose décla­rer aujourd’­hui : « Si à la sor­tie de cette crise, la réponse est l’austérité, [ceux qui nous gou­vernent] n’ont rien com­pris du tout. L’austérité et les logiques comp­tables, c’est quand même ce qui nous a mis dans cette situa­tion-là, notam­ment pour les enjeux de san­té et de pro­duc­tion de biens de san­té […] Et je suis farou­che­ment oppo­sé à l’idée de faire payer la fac­ture aux sala­riés. »
Là encore, quel aplomb ! Doit-on rap­pe­ler à M. Bertrand qu’entre 2004 et 2007, il était ministre de la Santé de M. Chirac, et qu’il porte une bonne part de res­pon­sa­bi­li­té dans le déman­tè­le­ment de l’hô­pi­tal public et la baisse du nombre de lits qui avaient déjà com­men­cé avant lui et qu’il a pour­sui­vis sans état d’âme !Xavier Bertrand - tweet Europe 

Rappel qui nous vient d’Albert Einstein : « On ne règle pas un pro­blème avec ceux qui l’ont créé. »

Ceci n’est qu’un début, et je ne doute pas que dans les semaines ou les mois à venir, les chantres du mon­dia­lisme vien­dront sol­li­ci­ter sans ver­gogne les suf­frages de ceux, qui, mal­heu­reu­se­ment, ont la mémoire trop courte.
Nous serons là pour leur rafraîchir…

Patrice LEMAÎTRE