Compostelle, un pèlerinage pour notre temps
Retour d’expérience

Chacun connait Saint Jacques de Compostelle, en Gallice, où sont conser­vées les reliques de Saint Jacques le Majeur. Cinq semaines de che­mi­ne­ment et d’immersion, de médi­ta­tion, de contem­pla­tion et de prière pour implo­rer la gué­ri­son d’un proche, m’ont récem­ment révé­lé que ce pèle­ri­nage sans âge est adap­té à notre époque éga­rée, témoin vivant des fon­de­ments de notre civi­li­sa­tion. Conservatoire de notre patri­moine, obser­va­toire de notre époque, il offre des res­sources de salut per­son­nel et d’intérêt public.

Le GR65, conservatoire naturel et culturel, observatoire de notre époque

Depuis Le Puy en Velay, on par­court à l’écart des routes bitu­mées, des régions iso­lées aux noms évo­ca­teurs de la France rurale his­to­rique, authen­tique, dans une nature pré­ser­vée de toute pol­lu­tion : le Gévaudan, la Margeride, l’Aubrac encore ennei­gé mi-mars, la val­lée du Lot, le Rouergue, le Quercy. On y trouve des gites et des hôtes accueillants et ins­pi­rés : Le Soulié (soleil), la Butte aux oiseaux, Chemin fai­sant, le Par’Chemin, l’Alchimiste. Aucun signe de pau­vre­té ni de sale­té « propres » aux milieux urbains. La qua­li­té excep­tion­nelle de vie y est faite de grands espaces et de silence, de ciels étoi­lés, de sim­pli­ci­té natu­relle, loin des mirages de la moder­ni­té. A par­tir de la Gascogne, en Armagnac, au Béarn et au Pays basque, la nature reste belle mais plus façon­née, les espaces plus habi­tés, le pèle­rin moins iso­lé. Les guerres fra­tri­cides de reli­gion, puis la san­gui­naire Révolution, ont effa­cé de nom­breuses traces de la Chrétienté.

Seule ombre au tableau, dans de nom­breuses com­munes, le plan natio­nal inavoué de rem­pla­ce­ment des popu­la­tions rurales de souche ou de culture fran­çaise par des immi­grés d’horizons loin­tains et de cultures étran­gères incom­pa­tibles avec la nôtre, est « En Marche » (Afghans, Syriens, Nord-Africains, Maliens, etc.). L’observation et les témoi­gnages des popu­la­tions locales, ni xéno­phobes ni racistes car habi­tuées à des tra­vailleurs sai­son­niers d’Europe cen­trale et du sud, mettent en évi­dence une réa­li­té occul­tée par les médias domi­nants. L’imposition for­cée, sans leur avis ni leur accord, de com­mu­nau­tés étran­gères sous cou­vert de for­ma­tion pro­fes­sion­nelle dont les béné­fi­ciaires assis­tés se dés­in­té­ressent autant que d’apprendre le fran­çais, de s’intégrer et de res­pec­ter la culture fran­çaise, pose des pro­blèmes crois­sants de sécu­ri­té. Ces com­munes non pré­pa­rées à cet afflux incon­trô­lé d’étrangers, servent de bases arrière de cri­mi­na­li­té dont des tra­fics natio­naux, notam­ment de drogue.

Le pèlerinage de Compostelle, une planche de salut personnel

On y che­mine de toute l’Europe depuis mille ans ; à notre époque, de tous les conti­nents. Parmi les voies qui convergent vers Saint Jean Pied de Port, près de la fron­tière espa­gnole, à mi-par­cours vers Saint Jacques (envi­ron 800 km), la ‘Via Podiensis’ est la prin­ci­pale, la plus fré­quen­tée et « habi­tée » par l’esprit du pèle­ri­nage chré­tien, ouvert à tous et à toutes les confes­sions. Elle est jalon­née par de nom­breux ora­toires et cal­vaires, cha­pelles et églises entre­te­nues par les popu­la­tions locales et ani­mées par des reli­gieux fran­çais ou étran­gers venus en ren­fort d’Afrique ou d’Asie pour sou­te­nir une France en voie de déchris­tia­ni­sa­tion. Des abbayes belles et aus­tères comme celle de Sainte Foy, à Conques, sont des bas­tions pro­té­gés d’un faux pro­grès bruyant et de l’air vicié du temps.

Plus qu’une marche, effec­tuer le « Camino de Santiago », Chemin de Saint Jacques, est une démarche per­son­nelle dont per­sonne ne res­sort le même, quelles qu’en soient les moti­va­tions. « À cha­cun son che­min ». Plus qu’ailleurs, on y véri­fie la maxime du grand-voya­geur et écri­vain suisse Nicolas Bouvier dans L’Usage du monde(1) : « On croit faire un voyage, mais en réa­li­té c’est le voyage qui vous fait, ou vous défait ». On y retrouve l’ambiance du beau récit ini­tia­tique Les Étoiles de Compostelle(2), du roman­cier bour­gui­gnon Henri Vincenot. Plus qu’une magni­fique ran­don­née, il offre à qui s’y aban­donne, une épreuve d’endurance et de résis­tance phy­sique comme condi­tion d’accès méta­phy­sique, un pro­ces­sus d’immersion spi­ri­tuelle et mys­tique qui trans­cende les consi­dé­ra­tions réduc­trices de pen­sée posi­tive et de bien-être. Un voyage ver­ti­cal autant qu’horizontal, dirait le poète Christian Bobin(3).

Tout pèle­rin y res­sent confu­sé­ment le « numi­neux », sen­ti­ment humain qu’on ne peut expli­quer de façon ration­nelle, d’une pré­sence divine. Décrit par le théo­lo­gien alle­mand Rudolph Otto (1869−1937), il est repris par Jean-François Colosimo dans l’éclairant essai Aveuglements(4) pour expli­quer l’échec de l’athéisme ambiant de notre temps, en mal de sacré : « Ce mys­tère de ce qui se mani­feste sans se dévoi­ler, vient d’ailleurs et advient comme un abso­lu»… « Il est tout-puis­sant. Car il consiste en l’irruption de l’infini dans la fini­tude ».

Le chemin de Compostelle, une œuvre d’utilité publique

Alors que la mode urbaine est aux expo­si­tions et musées immer­sifs, illu­sions dis­trayantes et éphé­mères car figées et arti­fi­cielles, le Chemin de Compostelle est assu­ré­ment le plus beau spec­tacle immer­sif fécond et natu­rel, vivant et éter­nel. Il nous ins­pire et nous donne le cou­rage de pui­ser dans un pas­sé riche de culture, d’architecture, de spi­ri­tua­li­té. Il nous offre les res­sources néces­saires pour conci­lier tra­di­tion et moder­ni­té, ima­gi­ner et réa­li­ser de vrais pro­grès, « réa­li­té qui s’amplifie et s’améliore tout en res­tant elle-même » selon le car­di­nal Robert Sarah.

Il nous revient, héri­tiers fran­çais de culture, de souche ou de bou­ture, de vivre et de faire vivre, de pro­té­ger et de défendre cet extra­or­di­naire havre de beau­té et de spi­ri­tua­li­té qu’est le Chemin de Compostelle, par toutes ses voies et variantes. Contre les dan­gers de la moder­ni­té. Contre la logique com­mer­ciale qui encou­rage une trans­hu­mance tou­ris­tique enva­his­sante, de mai à sep­tembre, au détri­ment d’une approche spi­ri­tuelle valo­ri­sée par l’association des amis de Compostelle. Qui pré­tend effa­cer toutes formes de spi­ri­tua­li­té chré­tienne au pro­fit, ou plu­tôt au détri­ment, de la culture, pour­tant indis­so­ciable du culte. Un exemple par­mi d’autres, la tra­di­tion du « Donativo », forme ancienne de soli­da­ri­té chré­tienne qui consiste à payer en par­tie les gites de façon dis­cré­tion­naire et ano­nyme, ou à don­ner en nature ou en argent, pour des per­sonnes plus dému­nies que soi, fait l’objet de pres­sions et d’attaques légales de la part de gites qui y voient une forme de concur­rence déloyale, et d’administrations qui en rejettent le carac­tère peu contrô­lable et tentent de lui sub­sti­tuer le voca­bu­laire répu­bli­cain de « soli­da­ri­té par­ta­gée ». Encore un progrès …

Décidément, Paris n’est pas la France, et réci­pro­que­ment. Les qua­li­tés propres du Chemin de Compostelle pour­raient être mises à pro­fit d’une cause d’utilité publique, par­tie inté­grante d’un pro­gramme intègre atta­ché la France. Tout en le sou­hai­tant à cha­cun, on pour­rait en impo­ser le che­mi­ne­ment à trois caté­go­ries : tous pré­ten­dants à des postes de res­pon­sa­bi­li­té publique régio­nale et natio­nale ; à des délin­quants notam­ment jeunes pau­més comme mode de rédemp­tion par une peine phy­sique et légale de sub­sti­tu­tion ; à tous pré­ten­dants à la natio­na­li­té fran­çaise, comme test pro­ba­toire. Pour leur apprendre à tous à connaitre, aimer, res­pec­ter et défendre la culture fran­çaise aux racines chré­tiennes. Car « on ne peut pas asser­vir l’homme qui marche », disait Vincenot. Ici, on ne pra­tique pas la marche à recu­lons comme forme tra­ves­tie et dévoyée du pro­grès, détour­née par des poli­ti­ciens-com­mu­ni­quants. On peut tou­jours rêver…

L’Usage du monde de Nicolas Bouvier et Thierry Vernet

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Les Étoiles de Compostelle de Henri Vincenot

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Aveuglements – Religions, guerres, civi­li­sa­tions de Jean-François Colosimo
Prix de l’es­sai des Écrivains du Sud

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Bonus : Jean-Michel Lavoizard sur Sud Radio le 29 avril 2024


Aris - Jean-Michel LavoizardJean-Michel Lavoizard est le diri­geant-fon­da­teur de la socié­té ARIS – Advanced Research & Intelligence Services.
Jean-Michel Lavoizard publie éga­le­ment sur Boulevard Voltaire.

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Jean-Michel Lavoizard

4 Commentaires 

  1. Merci à vous, Mandrake, Tutux et Michel Lebon pour vos com­men­taires. Je n’ai pas eu l’op­por­tu­ni­té de faire ce che­min au cours de ma vie, et à pré­sent l’âge ne me per­met plus vrai­ment de m’y col­ler. Mais je vous rejoins en esprit et j’ai aimé vos pro­pos. Deux d’entre vous parlent de spi­ri­tua­li­té, le troi­sième parle de « recueille­ment » et cela me plaît au-delà du terme « reli­gion » qui, nor­ma­le­ment devrait relier les humains entre eux mais qui, de par les dogmes (éta­blis par des humains) les divisent en réa­li­té.
    Merci donc encore pour vos témoignages. ♥

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  2. À Jean-Michel et à tous les voya­geurs.
    Connaissant d’a­vance le but pro­fond de ce voyage, je sou­haite saluer la per­for­mance phy­sique accom­plie par ce « che­mi­ne­ment » de quelques 800 kilo­mètres en 5 semaines.
    Mais Compostelle est plus que cela, c’est la révé­la­tion que le corps n’est que l’ou­til de l’âme.
    Car Compostelle est bien le vec­teur de la décou­verte et de l’ap­pré­hen­sion, voire pour les mieux pré­pa­rés spi­ri­tuel­le­ment, de « l’ap­pri­voi­se­ment » de ce que l’on ne peut concep­tua­li­ser que comme une « lumière ».
    Comme dans Le Petit Prince de Saint Ex, on entend bien vite ce qu’elle nous demande avec vigueur : « Apprivoise ‑moi ! »
    Compostelle n’est pas un che­min, c’est une voie !
    Lorsqu’on entend que « faire le Camino trans­cende », c’est ce qu’il se passe, c’est la « magie » de Compostelle.
    Un che­min on le par­court, une voie on la suit !

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  3. Des che­mins et lieux mer­veilleux de ran­don­née, il y en a par­tout en France ! VTT, pédestres ou avec des Zanimaux, La médi­ta­tion et le recueille­ment sur soi ou sur les choses de La Vie, peuvent se faire à tout moment, il suf­fit de cher­cher un peu autour de soi ! Je pra­tique cou­ram­ment depuis 1977 (17 Printemps), Nice et sa région en 1978 et en Mobylette Peugeot 103 depuis Avignon ! En solo ou en famille, depuis 1990. Il n’est pas indis­pen­sable d’a­voir un gros bud­get, le cam­ping atté­nue le prix de revient et per­met de voir des hori­zons dif­fé­rents, bien sûr, si on s’en donne la peine ! Le bon­heur et l’é­pa­nouis­se­ment ne sont qu’à quelques pas et selon votre rythme et san­té ! En plus, c’est à peine croyable, mais en dix ans, les lieux et la mémoire indi­vi­duelle, en plus des sai­sons, c’est une nou­velle décou­verte assu­rée à chaque fois ! La France est sublime et gagne à être connue en pro­fon­deur (sen­tiers bat­tus com­pris pour le dimanche) ! Commencez par la connaitre par­tout et en toute sai­son, avant de véri­fier si l’herbe est plus verte ailleurs !…
    Camarades de la Coquille, mes salu­ta­tions et toute ma consi­dé­ra­tion !
    Un Français de souche, qui connait pas mal, tout les che­mins de notre Pays et dans pas mal de cir­cons­tances (sauf la Corse et l’Étranger) !

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  4. Chacun son che­min. On part ran­don­neur, on arrive pèle­rin. J’ai eu la chance de che­mi­ner de Castres à Santiago et sa cathé­drale de St Jacques pour finir au Cap Finisterre, soit 40 jours de cette marche en avant. Au bout de quelques jours, débar­ras­sé de son quo­ti­dien, l’es­prit libé­ré pour une intros­pec­tion de sa vie, le spi­ri­tuel prend le relai. On retrouve au hasard des pay­sages des sou­ve­nirs enfouis. On a le temps de revivre tous les ins­tants de sa vie. On a le temps.
    Jusqu’à la révo­lu­tion indus­trielle du XIXème siècle, la vitesse des hommes, de l’in­for­ma­tion aura été celle de la marche. Laquelle marche aura per­mis toutes les explo­ra­tions, toutes les conquêtes. J’ai vou­lu vivre cette expé­rience humaine.
    Des pay­sages, des ren­contres dans près de qua­rante gîtes de toutes sortes. Des échanges riches de moti­va­tions dif­fé­rentes. Des pèle­rins de toutes les natio­na­li­tés.
    Arrivé devant la cathé­drale, sur la place devant St Jacques, j’ai retrou­vé un Espagnol qui jouait de la gui­tare, puis d’autres pèle­rins ren­con­trés quelques jours aupa­ra­vant dans autant de gîtes dif­fé­rents sont venus nous rejoindre. L’impression de retrou­ver une famille. Ce fut un ins­tant de musique magique, comme une récom­pense divine pour ce long che­mi­ne­ment.
    Au retour, il faut beau­coup de temps pour reve­nir à la triste maté­ria­li­té de sa vie.

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