Patrimoine : la Vallée des Merveilles, un merveilleux héritage
Le week-end dernier avaient lieu les journées du patrimoine dans toute la France. Cette heureuse initiative permet au grand public de pouvoir découvrir chaque année des lieux souvent inaccessibles le reste du temps. On voit donc ainsi la foule se presser pour découvrir l’Élysée, Matignon ou d’autres hauts lieux de la République.
Pour ma part, n’étant pas amateur de mouvements de foule, ni de bâtiments si beaux soient-ils, bref, n’étant pas citadin pour deux sous, mais montagnard dans l’âme, j’ai jeté mon dévolu sur une visite guidée des gravures rupestres de la vallée de Fontanalbe dans la haute Roya.
Ces gravures, comme celles de la vallée des Merveilles toute proche, représentent l’un des ensembles archéologiques mondiaux majeurs. Elles procurent par ailleurs un apport inouï sur la connaissance des premiers habitants de l’Europe et notamment sur leurs pratiques religieuses.
L’équipe de Nice Provence Info avait rencontré il y a deux ans l’archéologue dumézilienne Emilia Masson, chercheur au CNRS et grande spécialiste du site (voir notre article du 16 octobre 2016). Pour elle, c’est un endroit sacré central, un complexe rupestre majeur, un véritable « site sacré » qui est au cœur du système religieux de la vallée des Merveilles.
Quiconque s’intéresse à la spiritualité de l’Europe devrait visiter au moins une fois ces deux vals magiques et grandioses qui, en tant que lieux de « pouvoirs », ont attiré nos ancêtres. Ils ont convergé vers une montagne sacrée, image de la « montagne polaire », le Mont Bégo, qui culmine à 2 872m d’altitude (ci-contre).
Ce sommet ferreux a la particularité de souvent attirer la foudre, d’où le nombre important d’éclairs que l’on retrouve gravés sur les roches sous différentes formes.
Nos ancêtres ont balisé la voie, ils ont décoré ces lieux sacrés de multiples symboles fondamentaux :
• l’éclair, fulgurance de l’esprit
• la spirale, axe du retour au centre donc à l’origine
• des haches de pierre, archétype du marteau Mjöllnir du dieu Odin
• des poignards, etc.
Ainsi souvent l’interprétation, immense, réserve de symboles, reconduit le fin observateur aux runes originelles chères au chercheur Paul-Georges Sansonetti (« Les Runes et la Tradition Primordiale »).
De nombreuses gravures représentent également des taureaux. Le taureau est la force virile pure, le pouvoir fécondateur, l’énergie à l’état brut. En attelage, cette force est domestiquée et sert à « féconder » la Terre, Gaïa. L’homme indo-européen qui maîtrise la force brute et indomptée du psychisme, utilise l’araire comme outil mais surtout comme « instrument symbolique » de mise en forme. Cette maîtrise est représentée par le taureau attelé dont le socle va rendre productive et fertile une terre qui n’est autre que l’espace mental. Ceci rappelle qu’une terre mise en ordre, c’est-à-dire consacrée, devient qualitativement différente.
Elle est désormais sacrée et constitue l’image reproductive de la terre polaire originelle.
Ainsi ces territoires de montagne inhospitaliers sont-ils de véritables lieux de « pouvoirs », comme ailleurs dans le monde entier les objets de culte ou les pierres levées. Les gravures de la vallée des Merveilles et de Fontanalbe peuvent en effet être considérées comme de véritables livres de pierre. Ces supports de l’esprit pouvant être utilisés comme aides mentales à quiconque cherche le chemin du retour ramenant au Principe tel que l’a défini René Guénon.
Patrice LEMAÎTRE
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