Ma bonne semaine de mauvaise foi (16 juin 2019)

Dimanche 9 juin 2019

Retour sur Roland Garros, puisque le tour­noi est main­te­nant ter­mi­né. Je ne revien­drai pas sur le para­doxe évo­qué ailleurs dans nos colonnes par Michel Lebon, mais j’en évo­que­rai volon­tiers un autre, dénon­cé en son temps par Patrick Pelloux, le média­tique urgen­tiste. Au moment où un mou­ve­ment de grève, par­ti jus­te­ment du ser­vice des urgences, fait tâche d’huile et s’é­tend à d’autres ser­vices par­tout en France dans les hôpi­taux, sans qu’ap­pa­rem­ment cela émeuve qui que ce soit au gou­ver­ne­ment, il est bon de rap­pe­ler le dis­po­si­tif médi­cal dont dis­pose le tour­noi de tennis :

  • 9 chi­rur­giens, 8 urgentistes,
  • 9 écho­gra­phistes,
  • 2 radio­logues,
  • 31 kinés,
  • 20 infir­mières,

au ser­vice des per­sonnes fré­quen­tant les ins­tal­la­tions de la Porte d’Auteuil, qu’ils soient joueurs, ramas­seurs de balles, arbitres ou spectateurs.

Nombre d’hô­pi­taux n’ont pas ces effec­tifs à dis­po­si­tion pour s’oc­cu­per de leurs urgences. Et on dit qu’on ne trouve pas de per­son­nel. Combien gagne cha­cun de ces per­son­nels médi­caux pour un extra pen­dant le tour­noi ? Donner la réponse, c’est peut-être trou­ver un début de solu­tion à la crise qui couve, non ?

Parapluie Roland Garros

Lundi 10 juin 2019

Hier c’é­tait la pre­mière « marche des fier­tés en ban­lieues » dans la bonne ville de Saint-Denis (93). L’initiative avait pour but pre­mier de lut­ter contre l’homophobie en ban­lieue. On est quand même heu­reux de l’ap­prendre : il y a de l’ho­mo­pho­bie dans les ban­lieues ! Mais ça n’a aucun rap­port avec la caté­go­rie sociale, cultu­relle ou reli­gieuse des habi­tants bien sûr. Sûrement le hasard de la géographie.

N’empêche que cer­tains des mani­fes­tants recon­nais­saient être plus tran­quilles avec la pré­sence de poli­ciers qui enca­draient la manifestation.

Les orga­ni­sa­teurs annon­çaient la cou­leur : « Saint-Denis accueille la marche des fier­tés ». Outre qu’il fau­dra qu’on m’ex­plique un jour de quoi ces mani­fes­tants emplu­més et colo­rés sont fiers, je ne suis pas sûr que les habi­tants de la ville étaient aus­si fiers de voir défi­ler la troupe des inver­tis dans leurs rues.

Ce n’é­tait pas qu’un car­na­val. Les reven­di­ca­tions pou­vaient se lire sur les pan­cartes bran­dies : écri­ture inclu­sive, PMA, lutte contre le sida, droit d’asile des LGBT per­sé­cu­tés, libre choix du « genre » à la nais­sance. Toutes demandes dont se contre­fichent bien les res­sor­tis­sants des ban­lieue. Vous ima­gi­nez un imam récla­mer le droit d’a­sile pour des LGBT ?

Mais la fête n’a quand même pas pous­sé le bou­chon trop loin. On n’a pas osé faire défi­ler les chars, qui sont sage­ment res­tés dans Paris intra-muros et la pro­me­nade dans la ville s’est d’ailleurs limi­tée à quelques rues com­mer­çantes, à peine plus d’un kilo­mètre de marche, enca­dré par la police devant et der­rière (si j’ose dire!).

Quand deux mor­ceaux de la « France actuelle » se ren­contrent, ils font mine de s’i­gno­rer, d’i­gno­rer la pro­vo­ca­tion. Pourtant, on ne tar­de­ra pas à par­ler à nou­veau d’un de ces homos, ou trans, ou gay comme vous vou­lez, le jour où il se fera tabas­ser à la sor­tie d’un bar. Mais on ne fera pas le rap­pro­che­ment. « La ban­lieue ? On y est allé. Aucun risque, ils nous ont lais­sés tran­quilles ». Si on vous le dit.…

Marche fiertes banlieues 9 juin 2019

Mardi 11 juin 2019

Un jeune homme de 25 ans est mort en trot­ti­nette. C’est le second acci­dent mor­tel cette année, en effet, un pié­ton âgé avait été per­cu­té par une trot­ti­nette à Levallois Perret au mois d’avril.

L’accident s’est dérou­lé hier dans le très colo­ré quar­tier de la Goutte d’Or, dans le XVIIIe arron­dis­se­ment de Paris. La vic­time en trot­ti­nette a refu­sé la prio­ri­té à une camion­nette qui arri­vait sur sa droite. Le jeune homme a alors été per­cu­té par le véhi­cule avant de faire un arrêt car­diaque à l’ar­ri­vée des secours. Cet acci­dent inter­vient alors que les dis­cus­sions autour de ce moyen de trans­port vont bon train, depuis les jour­na­listes (Philippe Labro – Trottinettes élec­triques : « Les tueurs sont dans la rue ! ») jus­qu’aux auto­ri­tés pari­siennes puisque la maire, Anne Hidalgo, a annon­cé l’in­ter­dic­tion de sta­tion­ne­ment des trot­ti­nettes sur les trot­toirs et deman­dé aux opé­ra­teurs de limi­ter la vitesse des trot­ti­nettes élec­triques qui se mul­ti­plient dans l’es­pace public. Les trot­ti­nettes sont éga­le­ment inter­dites dans les parcs et jar­dins de la capi­tale. Il y aurait plus de 20 000 engins de ce type en libre-ser­vice dans les rues de Paris.

Quelques ins­tants plus tard, la police s’est vite aper­çue que la trot­ti­nette en ques­tion avait été volée alors même que le quar­tier était bou­clé par les forces de l’ordre.

Trottinette

Mercredi 12 juin 2019

Culture : il n’y en a que pour Paris !

En effet, Paris récu­père 90% du bud­get du minis­tère de la culture.
C’est une énorme injus­tice, tota­le­ment indé­cente, qui démontre s’il le fal­lait encore, le niveau de domi­na­tion de Paris sur la pro­vince méprisée.

Paris centralisation pieuvreMais ce n’est pas qu’une ques­tion de bud­get. La culture, vue par nos gou­ver­ne­ments, est un outil de mani­pu­la­tion très pro­fond. Les pou­voirs l’ont bien com­pris depuis les années 60 où ils avaient alors aban­don­né la culture à la gauche. Comme dans les démo­cra­ties sovié­tiques à l’é­poque, pré­sen­ter une culture unique, natio­nale, hégé­mo­nique est une manière d’é­touf­fer les cultures des peuples et des régions de l’hexa­gone, de les rendre insi­gni­fiantes, de les dis­cré­di­ter, de les ridi­cu­li­ser, au nom d’un uni­ver­sel pari­sien de plus en plus insupportable.

Pour l’au­dio­vi­suel public, c’est éga­le­ment 10% du bud­get qui est alloué « à la pro­vince ». Chacun dans sa ville de pro­vince, est donc obli­gé de subir les pro­grammes natio­naux. Quand aux pro­grammes dévo­lus aux régions… ils sont tel­le­ment de qua­li­té médiocre que ce ne sont pas eux qui vont atti­rer les spec­ta­teurs. Heureusement que des chaines régio­nales pri­vées ont vu le jour depuis…

C’est ain­si que l’on for­mate les réflexes de pen­sée de nos conci­toyens, pro­gram­més pour accep­ter leur sou­mis­sion à ce sché­ma jaco­bin, qui reste tou­jours très offensif.

Jeudi 13 juin 2019

Grèves dans les hôpi­taux et en par­ti­cu­lier aux urgences, quelques rai­sons de la colère :
Les entrées sont pas­sées de 8 mil­lions à 24 mil­lions en 10 ans alors qu il n’y a que 70 mil­lions de Français avec envi­ron 750 ser­vices d’urgence !

Parmi les­quelles il faut comp­ter le tou­risme médi­cal inter­na­tio­nal que le gou­ver­ne­ment n’o­se­ra jamais faire payer aux pays étrangers !

Les Ehpad sont obli­gés de mettre la nuit des aide-soi­gnants pour éco­no­mi­ser une infir­mière. Conséquence logique : pour régler fièvre ou petits maux on envoie les patients aux urgences !

Les méde­cins de ville ne font plus de garde la nuit, etc. Donc les patients se dirigent vers les urgences !

Des malades ne veulent plus avan­cer le prix d’une consul­ta­tion donc, direc­tion les urgences !

Les méde­cins urgen­tistes sont deve­nus de véri­tables parias de la médecine.

Bien sou­vent, ils ne sont pas payés de la 39e à la 48e heure de garde.

Face à ces pro­blèmes graves, le gou­ver­ne­ment ne pro­pose qu’un petit replâ­trage, quelques coups de pin­ceaux, his­toire de faire croire à une rénovation.

Quand ces­se­ra-t-on de bra­der la méde­cine des Français en leur don­nant un véri­table réseau de soi­gnants, dans toute la France, pas seule­ment à Paris ou dans les grandes villes ? Recrutons plus de méde­cins, ça évi­te­ra d’en recru­ter à l’é­tran­ger, où ils vont finir par man­quer à leur tour à leurs pays. Imposons un nombre de méde­cins par habi­tants équi­valent dans les villes et dans les cam­pagnes, géné­ra­listes et spé­cia­listes. Arrêtons de fer­mer les petits hôpi­taux au nom de la sacro-sainte mais scan­da­leuse rentabilité.

Où trou­ver de l’argent ? Quelques pistes :

  • Le coût de l’Aide Médicale d’État pour les étran­gers : envi­ron 1 mil­liard d’euros
  • Le total de la fraude sociale en France, incluant l’absentéisme, la fraude à l’assurance mala­die et aux caisses de retraite : un filon de 4 mil­liards d’euros, et plus globalement
  • Le total de la fraude fis­cale en France, repré­sente entre soixante et quatre-vingt mil­liards d’euros par an.

Manifestation hopital Rennes

Vendredi 14 juin 2019

Vous vous sou­ve­nez de Christophe Dettinger, ce boxeur, cham­pion de France poids lourds-légers en 2007 et 2008, condam­né pour avoir frap­pé deux gen­darmes lors de l’acte 8 des Gilets Jaunes, le 5 jan­vier à Paris, alors qu’il venait en aide à une jeune femme tabas­sée à terre par les forces de l’ordre macro­nien. Aussitôt une cagnotte avait été ini­tiée, les dons avaient afflué, attei­gnant en deux jours 130 000 euros selon Leetchi, 145 000 euros selon les Dettinger. Mais le 8 jan­vier, la pla­te­forme, sans doute sur ordre du gou­ver­ne­ment qui dénon­çait une apo­lo­gie de la vio­lence contre les forces de l’ordre, a fer­mé la cagnotte et blo­qué l’argent.

Une qua­ran­taine de sous­crip­teurs avaient alors por­té plainte, accu­sant Leetchi d’a­voir « mani­fes­te­ment détour­né les fonds remis par les par­ti­ci­pants ».

Et on a appris depuis que plu­sieurs dona­teurs avaient été convo­qués par la PJ dans une enquête pour abus de confiance, celle-ci aurait eu en effet accès à la liste des dona­teurs. Sur les réseaux sociaux mar­di soir, de nom­breuses per­sonnes dénon­çaient aus­si le fait que Leetchi ait com­mu­ni­qué ces coor­don­nées à la police.

Y a t‑il encore quelques liber­tés dans ce pays ?

Christophe Dettinger

Samedi 15 juin 2019

Un nou­veau col­lec­tif éco­lo­giste savoyard, « Faisons bar­rage », vient de se créer à l’initiative de citoyens d’Albertville et d’Ugine pré­oc­cu­pés par les pro­jets de pri­va­ti­sa­tion des bar­rages fran­çais appar­te­nant à EDF par le gou­ver­ne­ment Macron.

La pri­va­ti­sa­tion de l’énergie des bar­rages – de Savoie mais aus­si d’ailleurs ! – est

  • une véri­table menace pour la sécu­ri­té des habi­tants en aval,
  • une aber­ra­tion éco­no­mique pour le ser­vice public, il s’agit encore une fois de « pri­va­ti­ser les pro­fits et natio­na­li­ser les pertes ».

Ce sont les conces­sions d’exploitation d’un bien public (payé par la col­lec­ti­vi­té et lar­ge­ment amor­ti) qui sont offertes aux groupes finan­ciers pri­vés avec tous les risques de perte de maî­trise publique sur tous les domaines liés à cette res­source : pro­duc­tion, sto­ckage, irri­ga­tion, envi­ron­ne­ment, etc.

L’eau sous toutes ses formes doit res­ter un bien com­mun, les bar­rages font par­tie du patri­moine local. On peut craindre aus­si que la ges­tion pri­vée de cette « houille blanche » comme on la nom­mait autre­fois, ne crée des dif­fi­cul­tés très en aval pour le refroi­dis­se­ment des cen­trales nucléaires de la val­lée du Rhône.

C’est donc une pre­mière mani­fes­ta­tion contre cette tra­hi­son qui se dérou­le­ra le 22 juin près du bar­rage de Roselend en Savoie.

Roselend privatisation barrages

Bonne semaine à tous, et à dimanche prochain !

Patrice LEMAÎTRE