Tensions entre Paris et Alger : quelles conséquences ?

6 octobre 2021 | 1 com­men­taire

Le torchon brûle entre Alger et Paris

Après le rap­pel de son ambas­sa­deur, voi­là que l’Algérie inter­dit son espace aérien aux avions mili­taires fran­çais pour expri­mer son « rejet de toute ingé­rence dans ses affaires inté­rieures ». Mais que ce passe-t-il ? Quelle mouche pique le gou­ver­ne­ment algérien ?

Et bien, la mouche en ques­tion s’appelle Emmanuel Macron qui, par des pro­pos pre­nant le contre-pied de ses pré­cé­dentes génu­flexions et auto-fla­gel­la­tions mémo­rielles, s’en est allé faire des décla­ra­tions incen­diaires alors qu’il rece­vait des des­cen­dants de pro­ta­go­nistes de la guerre d’Algérie. Selon Le Monde, le chef de l’État fran­çais aurait esti­mé qu’après son indé­pen­dance en 1962, l’Algérie s’est construite sur « une rente mémo­rielle » évo­quant par ailleurs « une his­toire offi­cielle tota­le­ment réécrite [qui] ne s’appuie pas sur des véri­tés [mais sur] un dis­cours qui repose sur une haine de la France ». Selon les médias locaux, Emmanuel Macron aurait encore ajou­té : « Est-ce qu’il y avait une nation algé­rienne avant la colo­ni­sa­tion fran­çaise ? Ça, c’est la ques­tion » en rap­pe­lant qu’il y avait eu « de pré­cé­dentes colo­ni­sa­tions ». Il n’en fal­lait pas plus pour pro­vo­quer l’ire des auto­ri­tés algériennes.

Si de tels pro­pos sont frap­pés au coin du bon sens puisque décri­vant une évi­dence his­to­rique, il faut bien conve­nir qu’ils viennent aujourd’hui comme un che­veu sur la soupe. En effet, après avoir deman­dé un rap­port à l’historien contro­ver­sé, Benjamin Stora, por­tant sur la colo­ni­sa­tion et la guerre d’Algérie, Emmanuel Macron s’était livré à des décla­ra­tions de repen­tance tous azi­muts :
• recon­nais­sance de la colo­ni­sa­tion de l’Algérie comme un « crime contre contre l’humanité »,
• recon­nais­sance des fautes de l’armée fran­çaise dans l’affaire Audin (jeune mathé­ma­ti­cien et mili­tant de l’indépendance algé­rienne),
•recon­nais­sance du « pas­sé sombre de la France » (sin­geant Jacques Chirac dans son dis­cours le sur le Vél” d’Hiv),
• recon­nais­sance de la res­pon­sa­bi­li­té de la France dans le meurtre de l’avocat et natio­na­liste algé­rien, Ali Boumendjel

Pris dans cette folle poli­tique mémo­rielle, il a éten­du ses décla­ra­tions de repen­tance au géno­cide du Rwanda puis à la Polynésie recon­nais­sant une « dette » de la France à son égard.

Alors, aujourd’hui, qu’est-ce qui nous vaut cette volte-face du Président ?

Des consi­dé­ra­tions pure­ment élec­to­ra­listes, évi­dem­ment. Emmanuel Macron a conscience que la notion de par­don sus­cite bien des polé­miques et que ses juge­ments tota­le­ment néga­tifs sur la poli­tique de ses pré­dé­ces­seurs ne jouent pas en sa faveur dans un pays de plus en plus sen­sible aux thèses d’un Éric Zemmour qui reven­dique l’amour de la France et le patrio­tisme. Il voit que le débat poli­tique de pré-cam­pagne se cris­tal­lise autour des ques­tions d’immigration, de rési­lience, de fier­té, d’honneur – notions qui lui sont tota­le­ment étran­gères et qu’il a constam­ment bafouées – et se met à don­ner des gages. Mais, ce fai­sant, il joue avec des allu­mettes car ce petit jeu machia­vé­lique pour­rait bien avoir des consé­quences inat­ten­dues. Il pour­rait bien mettre le feu aux poudres des ban­lieues gor­gées d’allogènes indi­gé­nistes issus notam­ment des pays du Maghreb et nour­ris­sant une haine entre­te­nue à l’égard de la France qui pour­tant les accueille et les nourrit.

Dès lors, ces ges­ti­cu­la­tions de l’Algérie pour­raient-elles don­ner des idées aux Algériens en France ? Rappelons qu’en 2009, lors de l’élection pré­si­den­tielle algé­rienne, 776 218 per­sonnes étaient ins­crites sur les listes élec­to­rales en France. Cela repré­sen­tait envi­ron 4,4 mil­lions d’Algériens vivant sur notre sol selon l’ambassade d’Algérie à Paris. Ceux-ci consti­tuent la pre­mière com­mu­nau­té immi­grée avec 12,8 % du nombre total des étran­gers vivants dans l’Hexagone, d’après les don­nées de l’INSEE. Si cette popu­la­tion se sou­le­vait pour « laver l’honneur » de l’Algérie, une guerre civile pour­rait en décou­ler. La déci­sion de Paris de réduire for­te­ment les visas aux pays du Maghreb (dont l’Algérie) pour­rait bien ser­vir de détonateur.

Ce scé­na­rio n’a rien de far­fe­lu compte tenu du cli­mat explo­sif qui règne en per­ma­nence dans nos ban­lieues. Il est donc à espé­rer que les deux pays reviennent très vite à des rela­tions apai­sées et matures.

Charles ANDRÉ

« L’important n’est pas de convaincre mais de don­ner à réflé­chir. »​


Notre illus­tra­tion à la une : source Le Matin d’Algérie

1 commentaire

  1. C’est affo­lant ce pré­sident, il joue à quoi ? C’est tout et n’im­porte quoi.
    Il sera plus que temps que cette répu­blique « En Marche » finisse « En Courant »…

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