Une prière pour Zakhar
Qui connaîtrait chez nous tous ces noms héroïques, celui du légendaire président de la République populaire de Donetsk Alexandre Zakhartchenko, l’anti-Zelensky par excellence, celui d’Arseni Pavlov (dit Motorola), chef mythique du bataillon Sparta, ou encore celui de Vladimir Joga (dit Vokha), son fidèle et courageux successeur, et ceux de tous les autres héros et martyrs venus fouler le sol du Donbass au cours de ces dix dernières années, sans les œuvres majeures et inestimables que représentent Ceux du Donbass et Certains n’iront pas en enfer, écrites dans la sobriété d’un style débordant de vérité par l’incontournable Zakhar Prilepine ?
Issu d’une gauche tumultueuse sortie tout droit des champs de ruines du chaos post-soviétique, rompu au coup de feu au cours de la première guerre de Tchétchénie, nazbol(1) dans l’âme pour toujours et éperdument fier de sa russité, Zakhar Prilepine aura réussi l’exploit, inconcevable sous nos contrées irrémédiablement embourgeoisées, de passer du vain statut adolescent de militant à celui, devenu si rare, car adulte et historique, de partisan. Et si les imbéciles de Libération, d’Actes Sud, des Inrocks et de toute la clique bienpensante de la vieille gauche française dérangée (à défaut d’être dérangeante) l’ont porté au pinacle jusqu’en 2014 et L’Archipel des Solovki, ne voulant voir en lui qu’un doux bandit révolutionnaire mi-rocker mi-punk, reprenant vaillamment le flambeau de la dissidence politique à Anna Politkovskaïa au sein de la Novaïa Gazeta, force est de constater que la réalité du conflit du Donbass, avec le moment de vérité qu’il a nécessairement imposé, aura révélé à nos tristes révolutionnaires d’opérettes parisiennes le véritable Zakhar Prilepine. Ces bons bourgeois, qui ne parviennent à percevoir le monde et la réalité qu’à travers le prisme réducteur de leur infâme petit miroir égotique, auront appris à leur dépend que toute dissidence anti-poutinienne était loin d’être benoîtement libérale. En se révélant, dès le début du conflit, fervent chrétien et défenseur jusqu’au-boutiste de sa Sainte Russie, Zakhar Prilepine a rejoint Alexandre Douguine au rang des parias absolus et autres « ultra-nationalistes » de commodités.
Épargné au cours de ces dernières années dans un Donbass voué au feu et au sang, et où il aura vu mourir l’un après l’autre ses plus braves frères d’armes, c’est finalement dans la région de Nijni-Novgorod, dans son petit village situé à 900 km du front, sur un chemin de terre serpentant à travers les arbres, que Zakhar Prilepine aura roulé ce samedi 6 mai sur une mine posée ce matin-là à son intention. Après avoir tué l’été dernier la journaliste Daria Douguina(2), fille d’Alexandre Douguine, puis le blogueur Maxime Fomine (dit Vladen Tatarsky) le mois dernier, c’est cette fois-ci une figure encore plus iconique que les terroristes de l’Internationale bandériste ont cherché à éliminer en s’en prenant à l’écrivain-combattant Zakhar Prilepine. Personne d’autre que lui ne pouvait survivre à la puissance d’une telle explosion, pas même son frère d’arme et fidèle garde du corps Shubin, malheureux passager assis à ses côtés ce jour-là. Miraculé, les deux jambes cassés, c’est un Zakhar Prilepine plus dostoïevskien que jamais qui nous écrit tout juste sorti du coma artificiel dans lequel il avait été temporairement plongé : « Aux démons : vous n’intimiderez personne. Dieu existe. Nous allons gagner. » Zakhar Prilepine se remettra sur pied, il reprendra de plus belle le combat qui sera toute sa vie le sien et terminera la chapelle de son village qu’ils avaient commencée à construire avec son ami Shubin.
La Russie, à travers ses glorieux représentants que nous venons de citer, incarne plus que jamais pour notre Occident-collectif en voie de délitement final, l’insupportable miroir en négatif de notre propre décrépitude vitale et spirituelle.
Car si nous avons fait nôtre la spécialité de nous repentir sans fin de notre passé, ce n’est que pour mieux oublier l’infâme présent dans lequel nous nous vautrons tous sans discernement un peu plus chaque jour. Après avoir vidé le ciel de sa cité et du Dieu qui y régnait, vidé les mers de leurs poissons et les forêts de leurs bêtes sauvages, vidé enfin les corps de leurs âmes encombrantes, l’Occident agonisant, dans ses derniers soubresauts, utilise en vain le chaos comme ultime rouleau compresseur de sa stérilité envahissante. De Ben Laden à Al Nosra, en passant par l’UÇK, l’Occident-collectif sous tutelle américaine poursuit son œuvre nihiliste en Ukraine avec son soutien hystérique au terrorisme bandériste.
Face à ce déclin civilisationnel semble-t-il irrémédiable, la russophilie, et à travers elle l’exemple des slavophiles, nous apparaît comme un remède des plus précieux qu’il soit.
Il se trouve, paradoxalement, que le moindre brouillon de Dostoïevski ou Léontiev contient, pour tout véritable Français, infiniment plus de ressources spirituelles salvatrices, que dans la totalité des œuvres complètes en Pléiade de nos foutues Lumières. Et s’il n’existait aujourd’hui même qu’un seul Zakhar Prilepine en France, par le miracle de la contagion du courage cher à Soljenitsyne, la face moribonde de notre pauvre pays pourrait en être radicalement changée.
Car Zakhar écrit des livres pour nous réveiller, Zakhar combat les armes à la main pour la vérité et Zakhar bâtit des chapelles pour l’éternité.
Zakhar est en définitive le grand-frère courageux qui manque ici aux hommes n’ayant pas encore renoncé à l’usage de leur cœur et de leur mémoire. Loin du carcan idéologique étriqué qu’on lui prête, et de toute forme de nationalisme impossible, Zakhar a pris, pour sa plus grande gloire et celle de son peuple, le parti de la Tradition et de la fidélité à ses ancêtres.
Les Russes ont Zakhar Prilepine et les héros qu’ils méritent, la France, de son côté, Samuel Paty. Prions pour Zakhar, prions pour la Sainte Russie, lisons et relisons ses livres pour nous si précieux. Prions pour le réveil d’une France en dormance, ne nous laissons pas zigouiller et émasculer sur l’autel vaniteux d’une laïcité désincarnée qui n’existera jamais.
Tom Benejam
9 mai 2023
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NDLR : Lire également la recension de Certains n’iront pas en enfer publiée le 9 juin 2022 par Emmanuelle Caminade.
3 Commentaires
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Nazbol, de national-bolvévisme.
Lire : Nice : ferveur et dignité lors de l’hommage à Daria Douguine du 29 août 2022
Complément à mon précédent message : Lublin (Pologne) constate une augmentation « anormale » de la radioactivité dans ses environs.
Le Patriot détruit : 5 morts ukro-otaniens, dont « 2 instructeurs étrangers » – traduction : US.
(sources : Histoire et Société, topic journalier sur le 17 mai)
Merci pour cet éloge, effectivement.
Au fait, qui a entendu parler de Khmelnitsky ? Cette ville uknaze, au sud de Lvov, a vu 3 de ses dépôts militaires détruits ce samedi par des frappes russes (missiles Kalibr ou drones suicides Géran 2).
Or, l’un de ces dépôts contenait des armes à uranium appauvri, donc radioactives. Depuis « il y a du souci » pour les populations de l’ouest uknaze, de Pologne, et même d’Allemagne ; et, sauf erreur de ma part, aucune info en France… Pourtant, depuis lundi, nous avons un vent d’est ! Lavez bien vos fruits et légumes du jardin !
Autre info, « moins menaçante », et faisant plaisir : un système SAM Patriot détruit dans la région de Kiev par un Kinjal, même CNN parle « d’une unité Patriot endommagée », ce qui est un aveu, car le Kinjal loupé sa cible (inconnu à ce jour) ou la détruit tout simplement.
Sources : Top War RU, Avia-Pro, Histoire et Société (son topic journalier des opérations), et numidia-liberum.blogspot.com.
Merci pour ce remarquable éloge qui fait du bien à l’âme !