La « blockchain » pour nous délivrer de nos chaînes ?
Depuis la nuit des temps, tout groupe humain se place sous l’autorité d’un chef. Servitude volontaire, dictature orwellienne, soumission consentie, peu importe. Du chef de clan préhistorique au grand manitou du Nouvel Ordre Mondial, tout est commandé. La commune et son maire. Le club bouliste et son président. Le royaume et son roi. La société et son PDG. Du général au caporal. La France et son anagramme de Monarc.
Certes, l’Histoire témoigne de toutes ces entreprises avortées de se libérer de l’autocrate. Le fantasme de la « démocratie » — le Peuple exerce le Pouvoir — a vécu : le communisme aura duré un petit siècle tandis que les démocraties représentatives sombrent dans la corruption et la fraude électorale. Le libéralisme économique aboutit à une nouvelle nomenklatura, retour à la case départ. Rien n’y fait, à chaque fois la pyramide se reconstitue.
Le début du 21e siècle a vu exploser un nouveau venu dans l’organisation de nos vies, une révolution planétaire : l’Internet. Nous nous sommes tous approprié ce nouvel espace de liberté, du moins le pense-t-on. Que nenni, le WWW, World Wide Web a un pouvoir central détenu par les Américains. Les nouveaux dictateurs sont les GAFA. Un mot de travers sur la toile et hop ! devant les tribunaux.
Et voilà qu’un nouvel acteur vient bouleverser ce qui semblait être un ordre anthropologique immuable : la « blockchain »
Une blockchain, ou chaîne de blocs, est une technologie de cryptage sans organe de contrôle, autrement-dit sans autorité centralisée.
Sans entrer dans la complexité de la martingale, on comprend que ce type d’organisation se libère de toute autorité centralisée
Impénétrable, incraquable, les règles du jeu de départ sont vérifiées par une multitude anonyme d’autorités de contrôle, les mineurs (*). Tout le monde peut devenir mineur. Autrement dit la démocratie est directe, sans représentants, sans intermédiaires, sans hiérarchie. Chaque moindre action est validée par une puissance de calcul gigantesque décentralisée, les algorithmes.
La première chaîne de blocs a été conceptualisée par un inconnu au bataillon, un certain Satoshi Nakamoto en 2008. Elle a servi de base de lancement au bitcoin. Cette monnaie virtuelle échappait au départ aux banques. C’était un crime de lèse-majesté. C’était un séisme. Les banques ont senti le danger et se sont efforcées de reprendre la main, ce qu’elles ont en partie réussi.
Au delà de ce révélateur qu’est le bitcoin fondé sur ce mécanisme de la blockchain, bien d’autres aspects de nos vies pourront s’appuyer sur ce mode de fonctionnement. Tout un chacun peut dores et déjà créer sa blockchain : exemple, créer son album photo avec un protocole d’accès. On y entre par un token (traduction jeton, le bitcoin est un token). Déterminer qui peut y accéder, y ajouter des images, en retirer, les commenter, etc.
Le fonctionnement de toute entité pourrait s’organiser ainsi. Pourquoi pas la Constitution d’un État. Ce serait alors la fin de toutes les nomenklaturas, politiques, syndicales, médiatiques, financières, religieuses ! Ça fait rêver.
La communication générale médiatique s’efforce de faire silence radio sur la bête effrayante. On n’en parle pas. Les élites mondiales essaient de mettre la poussière sous le tapis d’ordinateur. Le stress s’empare de tous les dictateurs qui se réunissent à Davos ou ailleurs. Mais « pas qu’eux ». Sont menacées toutes les organisations non transparentes et lourdement pyramidales, avec un grand chef au sommet. Dans votre moteur de recherche, tapez : « blockchain notaires ». Une avalanche de liens renvoie à leurs états d’âme. Ces gens ont compris que leur existence est menacée. Ils essaient de reprendre la main et sauver les meubles.
Faut-il y voir un espoir ou un désastre pour notre liberté ?
De nombreuses questions subsistent.
La blockchain repose sur la sécurité inviolable du cryptage. Voilà un axiome bien fragile. On se souvient que pendant la Deuxième Guerre mondiale, l’inviolable Enigma nazie a été craquée par ni plus ni moins que le premier ordinateur mondial créé par Alan Turing.
De plus, ce contrôle réputé universellement partagé, l’est par… des humains, appelés pour la circonstance des mineurs (*). La chaîne de blocs pourrait bien se réduire à un bloc d’enchainés par des petits geeks malins.
Caricature de Zaïtchick [source]Enfin l’humain reste encore dans le dispositif. L’Intelligence Artificielle risque bien de prendre le pouvoir absolu, total. Je vous laisse imaginer la fin.
Cette course en avant est bel et bien lancée. Amis de la science-fiction, à vos plumes !
Michel Lebon
(*) Les mineurs dans une chaîne de blocs sont des individus anonymés en très grand nombre, qui ne doivent pas se connaître et qui vérifient les transactions et opérations effectuées par les utilisateurs de leur blockchain. Ils les inscrivent ensuite sur la chaîne (registre public) qui poursuit son parcours sur le réseau.
Michel, le type en polo rayé sur le caricature te ressemble, est ce volontaire ?