Zemmour peut-il gagner l’élection présidentielle ?
En hausse dans les sondages alors qu’il ne s’est pas encore déclaré candidat, Éric Zemmour surfe sur la vague de sympathie qui le lie avec son électorat potentiel. Il apparaît comme un phénomène mais il est surtout un anti-phénomène : de par ses constats simples, ses solutions simples et une communication « cash » accessible à tous. Mais cela suffit-il pour lui faire gagner l’élection à la présidence de la République ? La question se pose.
À ce sujet, il est intéressant d’examiner non pas les sondages qui, comme chacun sait, cherchent à faire du sensationnel pour faire vivre les instituts, mais le marché prédictif Hypermind. Il s’agit d’une plateforme de paris virtuels en ligne conçue pour prévoir l’avenir en interrogeant l’intelligence collective(1). Une sorte de salle de bourse où chaque prévision est cotée sous forme d’actions qui s’échangent sur le marché selon le même principe que la bourse des valeurs mobilières. Et force est de constater que cet outil prédictif peu banal fut le premier à annoncer, il y a déjà trois semaines, qu’Éric Zemmour avait devancé Marine Le Pen et se trouvait désormais en position de challenger désigné d’Emmanuel Macron. Le « marché » lui accordait alors 64 % de chances d’accéder au second tour. En revanche, le même marché estimait à seulement 29 % ses chances de gagner l’élection. Ça interroge tout de même. La formule vote d’adhésion au premier tour et vote « utile » au second serait-elle indéboulonnable en France ?
Une certitude cependant, Zemmour est le candidat anti-système qui connaît le mieux le système puisqu’il en sort. Avantage ou inconvénient ?
Pour l’instant, ses électeurs potentiels ne semblent pas s’en soucier et l’alchimie entre eux et lui se poursuit. Parce qu’il ne pratique pas la langue de bois germanopratine(2), il ne propose pas de révolution utopique mais fait les bons constats en y apportant des réponses claires. Ce qui tranche avec ses adversaires qui se sont toujours efforcé de rechercher le consensus soit par idéologie soit par manque de courage politique. Cette côte d’amour entre un homme et un électorat fait un peu penser à l’aventure Trump.
En effet, comme Trump, Éric Zemmour a pour lui l’absence de bilan politique ce qui le place de fait en homme providentiel. Il apparaît comme extérieur au système politico-médiatique dominant, incarnant le Peuple profond, celui des déçus, des « sans-dents », de « ceux qui ne sont rien », des Gilets Jaunes, de ceux « qui fument des clopes et roulent au diesel », des oubliés, des laissés pour compte d’une mondialisation sauvage et d’une Europe technocratique méprisant les Peuples. Son programme qui promeut l’exaltation nationaliste ratisse large car Zemmour n’hésite pas à désigner l’immigration arabo-musulmane et le Grand Remplacement de population dont elle est le corollaire comme responsables du déclin bien visible de la France. Enfin, le candidat (non encore déclaré) possède une immense maîtrise des médias et du système médiatique. Comme le dit Lydia Guirous, chroniqueuse pour RT-France : « L’homme est un animal politique qui sait exactement quand franchir la ligne rouge ou pas, quand faire du buzz et quand reprendre de la hauteur. Il a réussi à habiller le discours de Le Pen et de la droite des Républicains en le plaçant dans une dynamique intellectuelle et historique, qui flatte les gens qui l’écoutent. » Fort bien vu.
Pour le moment, la vague qui le porte semble tenir sa dynamique.
• Le RN faisant les frais des multiples conseils de discipline et procédures d’exclusion des têtes trop pensantes ainsi qu’un « édulcorage » du discours souvent mal compris de ses sympathisants/électeurs ;
• Les ténors de la droite politicienne, eux, empêtrés dans leurs paradoxes idéologiques, étant embarqués dans une énième opération marketing visant à faire avaler un produit périmé en le faisant passer pour du neuf ;
• quant à la gauche, thermidorienne(3) et cynique comme disent les universitaires Jean-Claude Pacitto et Philippe Jourdan auteurs d’une tribune parue dans Le Monde, elle souffre de ses fractures internes et n’arrive plus à se reconstituer.
Ainsi, Zemmour apparaît-il bien plus en phase avec un électorat que l’on croyait résigné à gober tous les cinq ans une indigeste couleuvre.
Voter Zemmour revient donc à voter pour une version « high level » de Marine Le Pen. La bonne conscience en plus. Aujourd’hui, Zemmour séduit beaucoup de monde, à gauche comme à droite. En l’écoutant, l’électorat se sent décomplexé et érudit. Cela peut-il durer ? Si l’on se réfère à nouveau au marché prédictif Hypermind, Michel Barnier, qui devance largement Xavier Bertrand et Valérie Pécresse, serait crédité de 11 % de chances d’accéder au second tour… sur les talons de Marine Le Pen et du chroniqueur de C‑News. Si les attaques incessantes et toujours plus violentes contre Zemmour portaient leurs fruits, les électeurs de la droite molle pourraient trouver plus politiquement correct de se détourner du trublion pour rejoindre l’ex-commissaire européen sans consistance qui embrasse maintenant les thèses de l’adversaire en proposant un moratoire pour geler l’immigration dans notre pays. Tout est possible.
Alors, Zemmour possible onzième président de la Ve République ? Rien n’est moins sûr à six mois du scrutin.
Charles ANDRÉ
« L’important n’est pas de convaincre mais de donner à réfléchir. »
(1) [NDLR] Le site HyperMind précise : « Hypermind consolide les prévisions de tous les pronostiqueurs en probabilités fiables via différentes méthodes issues des dernières recherches en intelligence collective. La méthode des marchés prédictifs permet de coter des prévisions en les soumettant à l’offre et à la demande d’un marché. La méthode Prescience sollicite les pronostics de chacun pour les agréger de façon algorithmique.«
Mais tout comme pour les sondages classiques qui s’affichent méthodologiques, il n’est pas interdit de s’interroger sur les manipulations que cette nouvelle méthode sous-tend.
(2) En référence au quartier Saint-Germain-des-Prés, à Paris
(3) Thermidorien : Les idées politiques et sociales des gouvernants thermidoriens reflètent celles de la bourgeoisie nouvelle, des acquéreurs de biens nationaux et des spéculateurs sur les fournitures de guerre ou les assignats, que les mesures en faveur des pauvres et la tentative de dirigisme économique des Montagnards, en l’an II, avaient inquiétés. Ils pensent, comme Boissy d’Anglas, qu”« un pays gouverné par les propriétaires est dans l’ordre social, celui où les non-propriétaires gouvernent est l’état de nature ». Assurer la prépondérance de la bourgeoisie révolutionnaire est le principal souci des thermidoriens ; leur œuvre annonce en cela le Consulat. [source : Encyclopædia Universalis]
Il suffit de s’intéresser de près aux « donateurs » de Zemmour pour voir que ce sont les mêmes que Macron et Sarko.
Étonnant non !
EZ comble un vide laissé béant par MLP. Mais ce qui est le plus incroyable c’est le non décollage de NDA qui est pourtant, et de loin, le plus sérieux et raisonnable, candidat de la droite patriote. La politique républicaine, c’est vraiment de la soupe à cochons.
Le parti de Marine Le Pen et LR ne peuvent gagner chacun sans l’apport d’Eric Zemmour. Or Zemmour a montré sa préférence pour LR. Tout se jouera au parti le plus intelligent qui voudra gagner la Présidentielle.
Éric Zemmour et Marine le Pen sont des lièvres mis en course pour faire re-élire… Macron !
Réponse à monsieur Miloud :
Éric Zemmour, sous-marin de Macron ? Vraiment ?
Ça, c’est nouveau !
Vous avez compris tout seul quelque chose que personne ne voit.
Mais si tel était le cas, toute la volaille politicarde ne serait pas en train de s’affoler.